Mais il est maintenant évident qu’il y a un défaut fatal dans le fonctionnement actuel du système : les banques d’affaires qui en sont les piliers n’ont objectivement aucun intérêt à faire des investissements (ou quoi que ce soit) sur le long terme. Leurs revenus ne proviennent pas de dividendes, d’intérêts ou de bénéfices liés à des activités productives, mais de commissions touchées à chaque transaction. Chaque fois qu’ils consentent un prêt, les banquiers touchent une commission. Il y a couramment des commissions de plusieurs millions de dollars, parfois plus. Dans l’OPA la plus fameuse à ce jour qui disposa de RJR Nabisco pour 25 milliards de dollars, Drexel Burnham Lambert reçut une commission de 227 millions de dollars pour avoir obtenu des banques commerciales un prêt-relais de 3,5 milliards et Merril Lynch en toucha une de 109 millions de dollars pour avoir arrangé un autre prêt-relais (afin de combler le trou entre la date de l’OPA et la cession, contre de l’argent frais, d’une partie de RJR Nabisco); un regroupement de deux cents banques, qui prêtait quant à lui 14,5 milliards de dollars, reçut une commission de 325 millions, tandis que Morgan Stanley et Wasserstein Pereira touchaient 25 millions de dollars chacun pour leurs conseils. De plus, Drexel Burnham Lambert gagna à côté une somme encore plus importante en rassemblant quelques milliards de liquidités supplémentaires pour l’OPA elle lança sur le marché ses « obligations pourries » à haut risque, aujourd’hui décriées, en les vendant à des financiers pris au piège (qui ne les achetèrent que parce qu’eux-mêmes avaient besoin d’« obligations pourries » pour leurs propres affaires) et à des organismes d’épargne et de prêt, ainsi qu’à
des caisses de retraite, qui n’auraient jamais dû investir leur argent dans du papier aussi douteux.
Même si la plupart des commissions sont moins importantes, elles représentent cependant des millions de dollars gagnés en quelques jours ou en quelques heures et cet argent est généreusement reversé aux banquiers d’affaires eux-mêmes, sous forme de salaires et de primes. L’argent réellement investi à des fins productives est, de leur point de vue, de l’argent qui dort et de l’argent inutile. Ce qu’ils veulent, ce sont des transactions, aussi nombreuses que possible. Dans l’idéal, il faut qu’il y ait une OPA contre une entreprise cotée en Bourse, de préférence une OPA hostile (ce qui engendre des commissions de part et d’autre). Puis le vainqueur devra rembourser les prêts à taux d’intérêt élevé dont il a eu besoin pour racheter l’entreprise, en vendant ses propres divisions, départements ou actifs (et en payant des commissions pour leur cession). Puis le vainqueur voudra émettre de nouvelles actions (en payant des commissions pour la souscription) afin de prendre rapidement son bénéfice sur le marché boursier, au lieu d’attendre des profits productifs (qui n’engendrent pas de commissions). Enfin, l’entreprise étant de nouveau cotée en Bourse, ses actions pourront être achetées à l’occasion d’une nouvelle OPA, et le cycle pourra recommencer.
Le résultat le plus évident de tout cela, c’est de détourner des milliards de dollars (qui auraient pu aller à des constructeurs, à des fabricants d’équipement, à des équipes de recherche) vers les comptes courants personnels des banquiers d’affaires qui les réinvestissent en partie de manière productive mais qui, pour une large part, les dépensent pour leur propre consommation, en biens luxueux.
Mais un résultat encore plus nocif, dès que le dernier krach et le dernier lot de scandales et de procès, de faillites et de banqueroutes seront bien oubliés, c’est l’infection du monde des affaires tout entier par la fièvre du « dollar vite gagné ». Car les banquiers d’affaires et leurs intermédiaires son propre compte, il avait été constamment sollicité et tenté par des banques d’affaires avides de commissions 6, Ils ne cessaient de lui répéter que ses jets Gulfstream, ses multiples résidences de fonction, ses fameux tournois de golf, son énorme salaire et sa retraite annuelle garantie de sept cent mille dollars (ou l’indemnité de quarante-neuf millions de dollars en cas de licenciement) n’étaient que de la roupie de sansonnet comparés à ce qu’il pourrait arracher à Nabisco s’il se débarrassait des actionnaires. Et Ross Johnson n’est pas une exception de fait, dans tout le pays, les dirigeants d’entreprises, qu’elles soient grandes ou petites, ont été fréquemment distraits de la marche de leurs affaires pendant la dernière saison flamboyante de Wall Street, et le seront à nouveau à la prochaine.
quinta-feira, setembro 18, 2008
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